Le site de Didier Delinotte se charge

RETOUR À REIMS (6) : LA CHUTE EN PLEINE ASCENSION

Karel Geraerdts, nouvel entraîneur du Stade de Reims version Ligue 2, une fois ! Ou plutôt deux fois car c’était Will Still le premier entraîneur belge. Photo site Stade de Reims.

Après une finale perdue contre le PSG (3- 0), on restait relativement confiant pour le match retour des Barrages contre Metz à Delaune, après le nul obtenu en Lorraine une semaine avant. On se trompait. Les Rémois, qui semblaient pourtant avoir le match en main, ont été battus aux prolongations et évolueront en Ligue 2 l’année prochaine. La chute le jour de l’Ascension et une nouvelle période d’instabilité qui s’ouvre.

Il en est des clubs de football comme de certains individus qu’on dirait voués à leur perte. C’est à croire que le Stade de Reims a tout fait cette saison pour passer à la trappe. N’importe quel observateur de la Ligue 1 vous dirait qu’ils avaient toutes les chances de se maintenir, mais il a fallu compter sur la fragilité psychologique d’un collectif et, sans faire de la thérapie de groupe à deux balles, sur son goût pour l’échec.

Le Championnat avait pourtant plutôt bien débuté. Peu de mouvements durant la période des transferts avec quelques départs de joueurs faisant souvent banquette (Richardson, Foket et Abdelhamid non reconduit), le recrutement d’un solide défenseur, Kipré, venu de West Bromwich (deuxième division anglaise) et, surtout, l’éclosion espérée des jeunes pousses du centre de formation dont Fofana, Koné, Sanghi, Atangana et autres Diakhon. Miser sur la jeunesse n’est pas toujours payant, mais les fonds étant bas avec la baisse des droits télé, il avait bien fallu s’y résoudre avec, en dernière minute, l’arrivée en prêt de Moscardo, ex-joueur des Coranthians de Sao Paulo déjà prêté au PSG.

On se disait que ce serait dur, et la première défaite à domicile contre Lille, avec une expulsion dans le premier quart d’heure, n’incitait pas à l’optimisme. On se trompait car les jeunes rémois, encadrés par des joueurs déjà confirmés, tenaient Marseille en échec au Vélodrome avant d’arracher des victoires prometteuses, à domicile et à l’extérieur. Sans parler d’un nul contre le PSG, premier revers parisien de la saison.

Un été indien qui prendra fin avec la première trêve internationale et un retour difficile pour les sélectionnés. Fin septembre, trois défaites de rang contre Auxerre, Brest à domicile et Toulouse. La défense flotte, le milieu est dominé et l’attaque stérile. Seul Diouf dans les cages fait des prouesses et retarde souvent l’échéance. Que s’est-il passé ? Les internationaux japonais (Ito et Nakamura) sont revenus fatigués et les espoirs n’ont pas confirmé. Tout feu tout flamme au début, ils se sont éteints au fil des matchs, à commencer par Yaya Fofana, jeune prodige qui finira sérieusement blessé.

Des blessés justement, il y aura aussi Khadra qui rejoindra à l’infirmerie et Daramy, international danois qui reviendra pourtant dans le groupe avant de se blesser à nouveau avec sa sélection. Rideau pour les deux joueurs et une carrière peut-être terminée pour le second . Triste.

Les résultats s’améliorent en fin d’année, avec une victoire au Havre, qu’on imagine déjà relégué à ce stade avec Montpellier et Saint-Étienne, tant l’écart est creusé. Un nul contre Monaco et un autre contre Lyon. Pas de quoi se rassurer totalement mais pas non plus trop de soucis à se faire. On sait à ce stade que Reims ne jouera pas l’Europe, l’équipe n’en a pas les moyens, mais qu’elle pourra passer l’hiver au chaud loin des affres de la relégation.

Pourtant, le spectre de la descente ne va pas tarder à se profiler à nouveau. Les Rémois perdent trois matchs d’affilée à Saint-Étienne, contre Nice à domicile et à Rennes. Les matchs dits faciles arrivent et on croit pouvoir s’en tirer avec les réceptions de Nantes, d’Angers et du Havre. Résultats, deux défaites à domicile et un nul lamentable. Ce n’est pas un autre nul, à Paris cette fois, qui va rassurer les supporters. L’équipe joue mal, la défense est régulièrement prise de vitesse, le milieu est poussif et maladroit quand l’attaque est terriblement inefficace. Nakamura et Ito ne sont plus que l’ombre de ce qu’ils ont pu être, Atangana et Koné deviennent des spécialistes des ballons mal donnés, des pertes de balles et des duels perdus. La défense centrale reste statique devant des balles hautes qui la laissent pétrifiée. Seul Diouf fait toujours son job dans son but, recueillant des éloges dans la presse spécialisée où on commence à parler de lui comme de l’un des tous meilleurs gardiens de la Ligue 1.

Luka Elsner, l’entraîneur, est remercié, remplacé par son adjoint, Samba Diawara, déjà adjoint des frères Still l’année dernière. Pire, le président Caillot et son directeur sportif décident de vendre deux des meilleurs joueurs. 40 millions d’Euros pour Agbadou qui part le premier à Wolverhampton, suivi quelques jours plus tard par Munetsi, qui devra se contenter de la moitié. C’est la consternation chez les supporters et les Ultrems, groupe de supporters les plus radicaux, menacent de ne plus soutenir le club. Caillot explique qu’il fallait refaire de la trésorerie après la chute drastique des droits TV et des recettes de billetterie insuffisantes. Soit, mais on ne comprend pas et il est attendu au tournant.

La saison continue à se dérouler avec son lot de défaites (cartons à Lyon et à Monaco, rebelote contre Auxerre). Reims n’a plus gagné depuis novembre et on est déjà en mars.

Le climat dans l’équipe est tendu. Diakité a fait perdre le match contre Angers en mettant un penalty trois mètres au-dessus alors qu’il n’était pas censé le tirer. Teddy Teuma, handicapé par des blessures, ne parvient pas à retrouver son niveau et passe son temps à engueuler ses coéquipiers, Diouf et Atangana ont une prise de bec sur le terrain. Diawara, malgré sa bonne volonté, répète les mêmes banalités en conférence de presse et ne parvient pas à remettre le collectif sur les bons rails.

Surprenant, le technicien malien va emmener son équipe en finale de la Coupe de France après avoir sorti Monaco et Angers (aux penalties) après Mutzig, Bourgoin-Jallieu (aux penalties aussi) et Cannes. C’est la divine surprise et Reims n’a pas disputé une finale de Coupe de France depuis 1977 (défaite contre les Verts), leur dernière victoire dans cette compétition remontant à 1958 (contre Nîmes).

Le parcours en Coupe aura-t-il fatigué une équipe déjà fragilisée ? Certains s’autorisent à le penser, d’autant que le banc n’est pas très profond et qu’on a vite fait le tour des remplaçants potentiels.

Ils sont arrivés pour la plupart au mercato d’hiver. Le Suédois Jeng, trop tendre pour la Ligue 1, l’Irlandais Patrick, joueur physique pas vraiment au niveau non plus, Sékoné, arrière latéral venu grossir le clan des Japonais et, surprise, Jordy Siebatcheu, venu de Moenchengladbach où il ne jouait plus et passé par l’Union Berlin, les Youngs Boys Berne et le Stade Rennais. Siebatcheu, tout un symbole, meilleur buteur du championnat de Ligue 2 l’année de la remontée (2018) et mascotte de Delaune. Il se blesse dès son premier match en coupe et ne fera plus que des apparitions fantomatiques en championnat. Seule satisfaction dans le lot, Morri G’Bané, un milieu défensif souvent amené à jouer en défense centrale où le départ de Agbadou et les suspensions à répétition de Okumu ou Kipré laissent un vide abyssal.

On recommence à y croire après un nul honorable à Brest, une victoire contre l’O.M puis une autre à Lens pour un hold-up avec Diouf en braqueur. Diawara a décidé de mettre le bus devant le but (5 défenseurs) et à procéder par contres.L’espoir renaît et on se dit que, après avoir été barragiste pour quelques jours, le vent du boulet est passé. Il y aura eu ce match de Strasbourg, Strasbourg qui compte pour beaucoup dans le désastre rémois. À Reims, les Alsaciens marquent vite mais l’arbitre de France le plus capé, Monsieur Le Texier, refuse un but à Ito… pour une faute de main d’un défenseur adverse ! Dans les arrêts de jeu, le même Ito est bousculé dans la surface par l’Argentin Barco, sans que le meilleur arbitre de France ne bronche. Deux expulsions plus tard, la défaite est là, et elle pèsera lourd.

Reims gagne contre Toulouse grâce à une tête lobée de Siebatcheu qui marquera là son seul but. On croit que le plus dur est fait d’autant que le prochain match est à Montpellier, équipe à la dérive déjà en Ligue 2 qui a perdu tous ses matchs depuis février. On devra se contenter d’un nul. Inquiétant.

Pendant ce temps, les Havrais gagnent tous leurs matchs à l’extérieur (après Lille et Lens, ce sera Auxerre puis Strasbourg pour l’ultime journée). Reims perd à Nice et se vautre à domicile contre Saint-Étienne (0-2). Seconde victoire à l’extérieur pour les Verts, après Montpellier justement. Il fallait un point pour se mettre à l’abri avec un goal-average nettement favorable par rapport à des équipes comme Saint-Étienne, Le Havre, Angers ou Nantes.

Un point qu’ils n’obtiendront pas et la dernière journée est un vrai cauchemar. Reims égalise à Lille mais, à 5 minutes de la fin, Okumu tombe sur Cabella et c’est le penalty alors qu’un autre penalty est sifflé à la Meinau, dans les arrêts de jeu. Reims est barragiste et on sait ce qu’il en est advenu.

Sauf repêchage inespéré (Lyon est dans le collimateur de la direction financière), Reims jouera à l’échelon inférieur et la question est de savoir, avec l’hémorragie qui se profile et les moyens à la baisse, si les rouges vont remonter tout de suite ou s’ils vont sombrer dans des divisions perdues. Nakamura, Ito, Diakité, Teuma et Moscardo sont déjà sur le départ. Aucune arrivée en vue, on fera avec ce qu’on aura en comptant beaucoup sur les pépites de la réserve, des pépites qui ne valent souvent que la publicité faite autour d’eux.

Alors, un avenir à la Lorient (remonté tout de suite sans trembler) ou à la Nîmes (descendu en National 2 après deux relégations successives). Sans vouloir être exagérément pessimiste, on parierait plutôt sur le second exemple. Tout ce qui reste est cette sensation de frustration, d’amertume, de tristesse et de colère pour un club qui s’est ingénié à tout gâcher, courant à sa perte plus vite que sur le ballon. Allez Reims quand même, mais on n’est pas prêt à remettre les pieds à Delaune, et encore moins à venir les voir jouer à Lens ou à Lille (ou Dunkerque en Ligue 2). Reims en Ligue 2, c’était impensable, mais c’’est fait ! J’ai la mémoire qui saigne…

5 juin 2025

PS : dernière minute, il se pourrait que le Stade de Reims soit repêché en Ligue 1 avec la rétrogradation administrative de l’Olympique Lyonnais déjà évoquée en novembre 2024 et confirmée le 24 juin. Lyon a fait appel et s’apprête à sortir les arguments sonnants et trébuchants, mais la LFP et son gendarme financier (DNCG) reviennent rarement sur leur décision. Suspense insoutenable et la suite au prochain numéro.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.

Catégories

Tags

Share it on your social network:

Or you can just copy and share this url
Posts en lien