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NOTES DE LECTURE 72

Encore une boîte à livres, photo Hélène Rose, avec son aimable autorisation.

HONORÉ DE BALZAC – ILLUSIONS PERDUES – Gallimard / Folio

Un pavé de Balzac qui trouve sa place dans sa Comédie humaine avant les Scènes de la vie parisienne et Splendeurs et misères des courtisanes dont on a parlé l’autre fois. C’est un roman en trois parties. La première se déroule à Angoulême où Balzac analyse comme il sait le faire les caractéristiques d’une ville de province avec ses coteries, sa bourgeoisie, ses rancœurs, ses rivalités. Ici, on a le frères et la sœur Chardon, nobliaux ruinés du côté de leur mère, une dame de Rubempré. Leur père est un modeste apothicaire et leur mère une garde-malade. Balzac n’a pas son pareil pour marquer les différences de classe entre les habitants de Lhomeau, un faubourg où vivent les aristocrates ruinés et les ouvriers, et la ville haute où s’ébat la bourgeoisie.

D’un autre côté, ce sont les Séchard avec le père, un vigneron méchant et avare et son fils David Séchard qui possède une petite papeterie d’où il s’apprête à breveter une invention de son cru consistant à fabriquer du papier avec des végétaux divers. Mais les Cointet, imprimeurs concurrents, veulent racheter l’imprimerie et le brevet et ils finiront par avoir le fils Séchard à l’usure. Lui épouse Éve Chardon, la sœur de Lucien quand Lucien s’amourache d’une aristocrate d’Angoulême, Madame de Bargeton. Elle est aussi amoureuse car Lucien est d’une beauté rare et il est poète. Le mari de la dame se bat en duel car suspecté d’être cocu et, pour échapper au scandale, la dame et Lucien s’en vont à Paris. Fin de la première partie.

À Paris, Madame Bargenton rencontre ses amis Monsieur du Chatelet et la comtesse d’Espars qui la mettent en garde contre ce qui serait une mésalliance. Épouser un poète sans le sou et sans noblesse. La seule condition serait que Lucien devienne royaliste et demande faveur au roi pour retrouver le nom aristocratique de sa mère. En attendant, il est abandonné et connaît la misère, se rapprochant d’un groupe de poètes romantiques baptisé Le cénacle. Il débute une carrière prometteuse dans la presse et essaie de faire publier un recueil de poésie et un roman historique. Il est guidé dans le Paris littéraire et mondain par Étienne Lousteau qui lui apprend les ficelles du métier. Lucien s’éloigne du Cénacle et il apprend tous les vices de la profession : articles mensongers, critiques insincères, canards et provocations. Il tombe amoureux de Coralie, une actrice, et s’éloigne de sa dame de cœur qu’il appelle maintenant comme tout le monde « l’os de seiche », son soupirant Chatelet étant baptisé « Le héron ». Libéral et romantique, Lucien écrit dans des feuilles royalistes pour arriver à ses fins mais il finit par déplaire à tout le monde, vomi des libéraux et indésirable chez les royalistes. L’argent vient à manquer et il tire des traites et demande des avances à son beau-frère qui lui donne tout ce qu’il possède, ce qui ne suffit pas à assécher le gouffre creusé par des dépenses inconsidérées et l’entretien de cocottes.

C’est la troisième partie et le retour piteux à Angoulême. Madame de Bargeton a épousé Chatelet passé à la paierie et Lucien essaie de sauver son beau-frère acculé à la faillite par les frères Contet et surtout abusés par un avoué aigrefin du nom de Petit-Claud. Séchard, sans le secours de son père, doit fuir et l’imprimerie est préemptée par les Contet. Il fera de la prison pour dette et Lucien, inconsolable et s’accusant de tous les malheurs frappant sa famille, décide de se suicider.

Il est recueilli sur la route par un fiacre dans lequel roule un prêtre de Tolède qui lui administre une grande leçon de cynisme. On aura reconnu la triste figure de Vautrin qui décide de prendre le poète faible et naïf sous son aile et de guider sa carrière dans le mal.

Un court épilogue clôture l’ouvrage, mais les personnages reviendront dans les œuvres futures.

On ne va pas dire que c’est le meilleur Balzac, plein de descriptions et de dialogues, la même chose qu’il semble déplorer chez d’autres écrivains. Balzac peut consacrer trois pages à décrire un bouton de porte. Trop de digressions aussi, sur le métier d’imprimeur, l’histoire du journalisme, les combines financières de l’époque… Tout cela est parfois difficile à lire et on finit par se lasser, même si c’est Balzac, sa vision impitoyable de l’humanité et son regard acéré sur la société de son temps, celle de la bourgeoisie sous Charles X. C’est Balzac, le Dickens français, c’est dire à quelle hauteur on le met.

JAMES HADLEY CHASE – TUEUR DE CHARME – Gallimard / Série noire

On connaît surtout James Hadley Chase pour ses deux livres mettant en scène Miss Blandish (Pas d’orchidée pour Miss Blandish et La chair de l’orchidée). Il est aussi l’auteur de Eva, adapté au cinéma par Joseph Losey. C’est un pionnier du polar hard-boiled (dur à cuire) avec Carter Brown et Peter Cheyney. Le monde de Chase est dur, impitoyable, avec des personnages cyniques, sans moralité et sans scrupule qui, pour arriver à leurs fins, n’hésitent pas à prendre au piège des individus naïfs et faibles. La loi de la jungle dans les grandes cités américaines. Asphalt jungle !

Ici, c’est Dave Calvin, un employé de banque que son patron envoie remplacer le gérant d’une succursale de Pittsville (Californie, pas Wisconsin), victime d’une crise cardiaque. Il vient à l’idée de Calvin de s’approprier la paie des ouvriers qui transite par cette banque chaque semaine. Pour cela, il imagine une machination mettant en scène sa logeuse Kit Loring, une alcoolique sans scrupule qu’il promet d’épouser une fois le méfait commis. Il s’agit pour elle de prendre l’apparence de Alice Craig, la personne qui dirige la banque avec Calvin et de faire en sorte que les soupçons se portent sur elle qu’on supposera enfuie avec son amant hypothétique alors qu’elle a été assassinée. L’amant est incarné par Calvin lui-même, habillé en cow-boy avec moustache et favoris postiches. Le but est de faire croire à son existence, au moins aux clients de la pension où lui et Kit logent. Mais les choses ne se passent pas selon le scénario prévu. Toutefois, la morale n’est pas sauve pour autant.

L’enquête commence avec Easton, un fédéral venu de San Francisco pour qui l’affaire est limpide : Alice Craig a fait le coup poussée par son amant. Ce n’est pas l’avis de l’adjoint du shérif Thomson, Ken Travers, le fiancé de Iris Loring, la fille de Kit, qui flaire la machination. Calvin voit en Kit le maillon fiable qui pourrait les trahir, aussi décide-t-il de la tuer. Il a proposé à sa fille le poste de Alice Craig. Les policiers retrouvent la voiture de l’amant supposé avec le corps de Alice Craig dans le coffre. Alors que Calvin veut noyer sa complice dans la baignoire, elle sort un revolver et les rôles s’inversent. Elle a tout raconté à un avocat qui doit transmettre les documents à la justice en cas de mort violente.

Selon la police, l’amant de Craig n’a pu quitter la ville et une forte récompense sera accordée par la banque à celui qui permettra de le retrouver. Iris Loring va travailler avec Calvin mais Travers vient lui dire qu’il a découvert le pot-aux-roses. Calvin est le voleur et l’assassin et il a abusé son entourage avec un déguisement et des postiches. Mais Calvin a commis une grosse erreur en tapant une lettre accusant Craig et son amant sur une vieille Remington de la banque qui tape mal certaines lettres. Il remplace nuitamment la machine, mais Iris Loring et Ken Travers ont tout compris. Ils ne soupçonnent pas encore Kit d’avoir été sa complice.

Calvin prétexte un déplacement à San Francisco pour laisser Iris seule en se doutant qu’elle va profiter de son absence pour chercher la Remington et l’argent. Fausse sortie, il la prend sur le fait et lui enjoint de sortir l’argent de la ville avec Travers dans la voiture pour échapper aux contrôles. Iris sait tout et Travers a deviné. Les amants diaboliques, qui maintenant se détestent, parviendront-ils à faire garder le secret à Iris ? Iris décide de partir à San Francisco et se marier avec Travers qui démissionne de la police, au grand soulagement de Calvin. Sauf que la culpabilité envahit sa future femme. Elle fait un scandale en menaçant de se jeter du haut d’un immeuble. Nos deux amants criminels finiront-ils sur la Chase électrique ? Non. On ne va pas raconter la fin, mais ça se termine mal, sans surprise .

Un bon polar, sans génie mais bien construit avec, en creux, le portrait d’une bourgade américaine des années 50, l’Amérique d’une certaine innocence, ou naïveté, en surface seulement. Bien vu, et efficace.

FRANÇOIS MAURIAC – LE BAISER AU LÉPREUX – Grasset / Le livre de poche

Il y a deux Mauriac, le curé militant de l’Action française proche des Barrès et Maurras et le chroniqueur de l’Express vent debout contre la torture en Algérie. Entre temps, on en a eu un troisième, à savoir le Gaulliste épurateur mais on ne pourra reprocher à Mauriac de s’être souvent remis en question, un peu à la manière d’un Bernanos pour  lequel j’ai la plus grande admiration.

C’est une œuvre de jeunesse (1921) où Mauriac met en scène un jeune homme conscient de sa laideur et de son insignifiance – Jean Péloueyre – incapable de vivre une vie normale. Son père Jérôme, valétudinaire toujours entre deux siestes, a formé le projet de le marier à une certaine Noémi, belle fille de la campagne, afin surtout d’avoir une descendance, de sorte que son magot n’aille pas aux Cazenave et à leur chef de clan, un notable anticlérical. On est chez Mauriac quand même, et les histoires de famille, les intérêts et la religion ne sont jamais loin.

Les mariés s’évitent et la présence de Noémi n’a pour effet que de revigorer le père dont elle s’occupe avec dévotion. Jean va parfois à Arcachon chez une prostituée mais ne touche pas son épouse, certain qu’elle lui répugne. Il renoue avec sa vie de cloporte, errant dans les chemins et chassant parfois en évitant le regard des autres.

Le curé de la paroisse l’incite à partir pour Paris aux fins de recherches historiques sur le village. Il s’y rend, traînant entre des églises et des bordels où il ne consomme jamais, fasciné par les prostituées. Pendant son séjour parisien, Noémi a un faible pour un médecin venu de la ville soigner Robert Pieuchon, un jeune tuberculeux ami de Jean. Le médecin passe tous les jours sous ses fenêtres. Jean revient de Paris malade et elle fait appel à ce même médecin mais c’est elle qui finit par l’éconduire, comme pour chasser son désir.

Jean a la tuberculose et on soupçonne ses contacts avec Pieurchon. Noémi fait à nouveau appel au médecin attiré par elle. Jean meurt et Noémi ne se remariera pas. Elle rencontre à nouveau le médecin par hasard et il s’approche d’elle. Elle le fuit, jurant fidélité à son époux défunt qu’elle croit voir dans un vieux pin décharné. Elle ne l’aura profondément aimé qu’une fois mort. Ainsi s’achève le récit.

On reconnaît là Mauriac et son amour très catholique pour les humbles, les faibles, les opprimés. Dans les premiers chapitres, il cite souvent Nietzsche mais c’est pour mieux contrebalancer ses obsessions très chrétiennes pour l’humilité, la volonté de puissance et la force de vivre avec la maladie, la souffrance et la mort qui seuls rapprochent de Dieu et des hommes. En cela, il est proche d’un Bernanos, même s’il n’en a jamais eu le génie. On pense à cette épigramme de Sartre  qui reprochait à Mauriac d’être présent dans la tête de tous ses personnages, ne leur laissant aucune liberté, comme le Dieu des chrétiens:  « Dieu n’est pas un artiste, Monsieur Mauriac non plus ». Peut-être pas un artiste, mais un grand écrivain, on en dira peut-être pas autant de Sartre.

SIMENON – LE CHIEN JAUNE – Gallimard / Le livre de poche

Encore un Simenon que je ne résiste pas à tirer de la boîte, quand j’en trouve un. Une lectrice de ce blog m’a fait remarquer que Maigret était misogyne. Pas beaucoup plus que Connelly qu’elle adore.

On peut dire beaucoup de choses de Simenon, pas vraiment un humaniste mais bon, on a déjà parlé de tout ça et je n’y reviens pas. Misogyne ? Parce que Madame Maigret lui prépare son frichti quand il est en mission ? C’était plutôt dans l’ordre de choses à l’époque, malheureusement. On peut aussi parler de San Antonio et de Félicie, sa brave femme de mère, toujours à veiller au confort de son fils. Les temps ont changé et c’est tant mieux.

En peu de mots, la préface de Marcel Aymé dit tout de Simenon et de Maigret : le commissaire ne fait pas de psychologie pas plus qu’il ne s’appuie sur la logique, il se met dans la peau de ses personnages et se laisse guider par l’atmosphère environnante. C’est ce qui fait tout le charme de ses enquêtes.

L’histoire est connue : une série de tentatives de meurtres dans la ville de Concarneau (coup de revolver, empoisonnement, agression au couteau) et, à chaque fois, la présence d’un vieux chien couleur jaunâtre. On pense au roman de Jean Ray, La cité de l’indicible peur, adapté au cinéma par Jean-Pierre Mocky sous le titre La grande frousse. Sauf qu’ici c’est du sérieux.

Trois notables, habitués du café L’amiral, semblent les victimes du potentiel assassin. On retrouve le chien ensanglanté à la suite d’un nouveau tir au revolver. Il a les reins brisés. Le phare de Brest, journal local, a publié un article sur les mystères de Concarneau, remis par un inconnu. Maigret paraît dépassé et, aidé de son inspecteur, va d’une scène de crime à l’autre. Seul indice, les grands pieds de l’assassin.Mais tout cela n’est que hors-d’œuvre et Pommeret, l’un des trois notables, est découvert mort empoisonné chez lui. Un matin, un clochard fausse compagnie à deux gendarmes sur un marché, l’homme a été trouvé dans les recoins d’un phare, vivant de rapines. Maigret met le docteur Michoux, l’un des trois notables, en prison pour le protéger. Le troisième, Servières, est toujours porté disparu.

Depuis le toit de l’Amiral, Maigret surveille le vagabond qui s’est réfugié dans une chambre où il reçoit la visite de la serveuse de l’établissement. Au même moment, le douanier témoin de la première tentative de meurtre échappe lui-même à un tir de revolver. Pas de chien cette fois-ci. Servières quant à lui a été vu à Brest et appréhendé par la police à Paris. Un disparu bien visible, en voyage. Cinq jours que Maigret est sur place. Le maire le harcèle et les journalistes s’impatientent. La ville réclame un coupable et Michoux sue la peur depuis sa prison. Un final à la Agatha Christie, tous en scène.

Le vagabond – Léon – s’est fait manipuler par les trois notables et un Américain agent de la prohibition (le roman est daté de 1931). Ils l’ont incité à charger de la cocaïne dans son bateau avant de partir pour New York, l’ont dénoncé et ont touché la prime. Léon a tiré cinq ans à Sing Sing où il a adopté le chien.

Ici aussi, on ne va pas divulguer l’épilogue, encore qu’on puisse facilement le deviner. Une histoire de vengeance à rebours où l’on entend neutraliser l’offensé revenu en ville.

J’avais déjà lu ce livre il y a des années et c’est l’un des Maigret les plus connus, mais on s’y replonge avec délice. Simenon est ce qu’il est, mais son Maigret a toujours eu pour mission de coincer les plus beaux spécimen de cette bourgeoisie cynique et de venger ses victimes, les pauvres et les faibles. Il ne se fait aucune illusion sur la possibilité de changer le monde, mais il fait son devoir là où il est. Une figure de chevalier au chapeau cabossé et au pardessus élimé. 75 Maigrets publiés entre 1931 et 1972. 75 raisons, à chaque fois, de se réjouir !

ANDRÉ GIDE – CORYDON – Gallimard

De Gide, on l’a déjà dit, on apprécie surtout ses romans écrits en moraliste ironique tels Les caves du Vatican ou Les faux-monnayeurs. C’est ici un tout autre exercice auquel il se livre.

Dans la préface, il est écrit que Gide considérait Corydon comme le plus important de ces livres. Il est en tout cas le plus oublié aujourd’hui. À 55 ans, Gide quitte sa femme et se décide à assumer son homosexualité. Il part avec le jeune Marc Allégret de par le monde et son Corydon vise à sortir l’homosexualité de l’enfer où la société la tient. En protestant moraliste, il entend démontrer que l’homosexualité n’est ni abjecte, ni damnable, qu’elle est une forme d’amour qui a toujours existé.

Il faut se souvenir de la forte hostilité que Gide avait pour Proust. Pour lui, Proust peignait dans son œuvre des invertis, des homosexuels efféminés, presque des travestis. Pour Gide, l’homosexualité peut et doit être virile, se référant aux Grecs et aux Romains. Elle n’est en aucun cas une pâle imitation du féminin par l’outrance ou le travestissement. On laissera cette vision personnelle de l’homosexualité à l’appréciation de nos modernes LGTBQ+ et que sais-je encore ? Mais venons-en au livre.

Corydon est un berger joueur de flûte dans la mythologie grecque. Le personnage de Corydon est ici un homosexuel ami de l’auteur qui défend son point de vue au long de quatre longs dialogues socratiques avec Gide lui-même. Son point de vue : que l’homosexualité a existé de tout temps et qu’elle s’est répandue surtout à des périodes d’épanouissement artistique et culturel.

Les quatre dialogues portent tour à tour sur la science ou plutôt la zoologie, sur l’art, sur la philosophie et enfin sur l’histoire. Une démonstration pas toujours facile à suivre et dont la thèse peut paraître hardie à celles et ceux qui tiennent l’homosexualité pour une anomalie, une aberration ou, pire, pour un vice. Corydon se faisant l’interprète de Gide affirme qu’il n’en est rien et qu’au contraire, le règne animal et l’histoire de l’humanité tendent à démontrer que l’homosexualité n’est qu’une forme d’expression différente du désir et de la sensualité, de la libido pour le dire autrement.

Rien là de révolutionnaire pour les contemporains que nous sommes, mais il faut savoir que la première version de ce livre, longtemps resté inédit, date de 1911. On peut juste reprocher à Gide le fameux précepte qui veut qu’à vouloir trop prouver… Comme si l’homosexualité devait être la règle et l’hétérosexualité l’exception. C’est parfois ainsi qu’on l’entend, mais on ne peut que saluer cette ode à la tolérance et au dépassement des préjugés et des a priori. Gide n’était pas un pédé honteux. Un juste !

5 novembre 2024

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