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RADIO TÉLÉ FOOT : DANS LA LUCARNE!

Philippe Gildas et Roger Piantoni qui fumait dans le studio. Photo SUD OUEST (avec leur aimable autorisation).

Si, hélas, pendant plus de 50 ans, Thierry Roland aura été « la voix de la France » du football, on aura compté moult commentateurs dans tous les médias audiovisuels qui, certes moins connus, auront été souvent plus talentueux. Sans remonter aux premiers matchs commentés par Georges De Caunes sur les antennes de l’ORTF, on peut s’arrêter sur quelques noms qui ont jalonné l’histoire du commentaire footballistique à la radio et à la télévision. Quelques noms qu’on passe en revue ici.

Thierry Roland d’abord, puisqu’il faut absolument parler de lui quand on entame le sujet. Tel un Philippe Manœuvre qui passe pour le théoricien du rock tout terrain, Thierry Roland a longtemps été abusivement Monsieur Football auprès des Français. Pourtant, que d’incompétence et que d’approximations derrière un enthousiasme de tribune souvent vulgaire et chauvin. Non seulement Roland n’était pas le grand connaisseur en foot qu’il prétendait être – beaucoup de lacunes sur les schémas tactiques, les styles de jeu, sans parler d’un manque de culture préjudiciable et de difficultés chroniques avec les noms étrangers – mais il s’est toujours distingué par son patriotisme à la Déroulède, sa bêtise à front de taureau perceptible à la lumière de ses innombrables plaisanteries de garçon de bain et, surtout, un racisme d’autant plus manifeste que difficilement réprimé. Voici l’homme.

Longtemps supporter du Racing Club de Paris, Thierry Roland, nostalgique, s’est ensuite tourné vers le Stade de Reims (un bon point), mais il se portait au secours de la victoire, tantôt supporter de l’A.S Saint-Étienne, de l’O.M ou du PSG. Il était un indéfectible soutien des bleus, on ne peut pas lui enlever ça. Longtemps spécialiste du foot à l’ORTF, Roland s’en fera viré en Mai 68 pour faits de grève (comme quoi…) avant de rejoindre France Inter et son ami Jacques Vendroux. Il présentera longtemps  Sports et Musique avec Bernard Père, le dimanche, et ira faire les pronostics du tiercé à Europe 1 avant de regagner la télé publique sur Antenne 2 puis ce sera TF1 où il commentera des centaines de matchs avec son compère Jean-Michel Larqué. Ce seront les mémorables dialogues, les « eh oui Jean-Michel » répliquant à des « Tout à fait Thierry ! ». En même temps, Roland anime Téléfoot, émission présentée à l’origine par le Corse Pierre Cangioni puis par le Michel Denisot d’avant Canal, en duo avec Didier Roustan, maintenant chroniqueur sur le site de l’Équipe.

Son grand regret sera d’avoir manqué la Coupe du monde 1970 à la télé, commentée par son meilleur ennemi Michel Drucker (avec Roger Piantoni comme premier consultant de l’histoire) pour la première chaîne. Il loupera aussi 1974 en Allemagne fédérale, avant des retrouvailles avec son public dans l’Argentine de Videla.

Mis à pied à TF1 après sa fameuse sortie cri du cœur contre un arbitre écossais : « Monsieur Foote, vous êtes un salaud ! », Roland sera longtemps après poussé vers la sortie avec l’arrivée de techniciens comme Arsène Wenger ou Bixente Lizarazu, Thierry Roland ira terminer sa carrière à M6 où il pourra quasiment mourir au micro, comme Molière sur scène, à 75 ans. On retiendra de lui une sorte de pisse-vinaigre au rire parfaitement idiot qui fit le bonheur des Grosses têtes de Philippe Bouvard. On retiendra aussi l’enthousiasme et la nostalgie, quand même.

Parmi les partenaires de Thierry Roland, on a cité Jean-Michel Larqué, ex joueur des Verts de la grande époque. Autant Roland était léger sur le plan tactique, autant Larqué avait tendance à trop s’appesantir sur ces aspects, jusqu’à parfois user d’un langage de prof de gym un rien pénible.

Autre collaborateur, le mot est bien choisi, le petit nazillon Olivier Rey, actif dans l’extrême-droite française et grand ami de Patrick Balkany, qui se porta acquéreur, avec Jean-Pierre Brunois, d’un France Soir devenu journal de caniveau et contribua à révéler l’affaire O.M – V.A, ce qui lui vaudra de se faire débarquer d’Antenne 2 sous la pression de Tapie. Homme de presse, Rey avait aussi racheté But et fondé France Rugby. Sa dernière preuve de vie fut la reprise du Racing Levallois, ex Racing Club de Paris et de France, dans la bonne ville de son ami Balkany. Un bien triste sire.

Tout le contraire d’un Bernard Père, père tranquille du journalisme sportif, lui aussi ancien de l’ORTF et complice de Roland sur France Inter et sur Antenne 2 où il sera à l’origine de la création de Stade 2 avant de se tourner vers le Basket-ball dont il était un éminent spécialiste.

Sur la télévision du service public, sur la 2 et sur la 3, on pourra entendre le fade Mario Beuna avant le sympathique Michel Drhey, longtemps en exercice et qui commentera pour la deuxième chaîne les coupes du monde de 1970 au Mexique et de 1974 en Allemagne. Puis viendront Roland et Père avant une armée de commentateurs interchangeables entourés de consultants ennuyeux.

Dans la maison d’en face, à TF1, la voix de Thierry Roland a toujours tonné fort, mais on retiendra aussi des figures plus discrètes comme Roger Zabel ou Thierry Jeanpierre, longtemps animateur de Téléfoot lui aussi. Et des consultants de luxe parmi lesquels Guy Roux, Arsène Wenger ou Bixente Lizarazu. On a maintenant Grégoire Margotton, au style un peu raide malgré une compétence certaine éprouvée au service de Canal +.

Canal où auront évolué le triste Michel Denisot mais aussi l’excellent Thierry Gilardi ainsi que les duettistes Hervé Matou et Pierre Menès, ineffable gros con sexiste à la réputation de fin connaisseur du football. Et puis n’oublions pas Charles Biétry, longtemps directeur du service des sports, formé à l’AFP et spécialiste de boxe avant de devenir le chroniqueur sportif tout terrain que l’on sait, aussi bien sur Canal que sur la télé de service public ou sur TF1. Biétry va ensuite se recycler chez beIN et à l’Équipe TV pour finir dans le hautes sphères de clubs comme le PSG, Lorient, Rennes et Lille.

Autre ancien de Canal, Denis Balbir qui va longtemps donner de la voix à M6, avec des consultants souvent trop discrets comme Jean-Marc Ferreri ou Jean-François Domergue avant un Robert Pirès pas toujours inspiré au micro. Pirès accompagne Xavier Domergue (un homonyme) qui a remplacé Balbir, placardisé pour de nombreux propos homophobes. Bref, l’auto-proclamée « petite chaîne qui monte », malgré le passage d’un Thierry Roland en pré-retraite, n’aura jamais été une grande chaîne de football.

À la radio, on aura longtemps sur Europe 1 l’une des grandes voix du foot en la personne d’Eugène Saccomano. Aussi irritant par ses trémolos et ses envolées qu’hilarant dans ses dérapages contrôlés. Une voix qui fait vibrer et qui vous fait participer à l’événement. Grand supporter de l’O.M, Saccomano quittera Europe 1 pour RTL où il va animer On refait le match, avec des comparses pas toujours recommandables du genre Roland (encore), Pascal Praud ou Olivier Rey. Mais bon… On peut parler aussi de Fernand Choisel, plus sobre et plutôt versé dans le cyclisme, même s’il a longtemps commenté le football sur l’antenne avec Roger Piantoni comme consultant de luxe. Piantoni qui fut au foot à la radio ce qu’a été Pierre Albaladejo avec Roger Couderc pour le rugby.

À RTL, on peut retenir le fidèle Guy Kédia, journaliste sportif tous terrains lui aussi et ancien du Combat d’Albert Camus et Pascal Pia. Kédia était directeur du service des sports et il a formé quantité de journalistes comme Jean-Jacques Bourdin, Bernard Roseau, Roger Zabel ou encore Christian Ollivier. Beaucoup sont passés à autre chose, hélas…

RMC est connu pour l’émission de Luis Fernandez, Luis attaque, comme pour les commentaires éclairés de Jean-Michel Larqué. La radio, plein sud oblige, a toujours préféré le rugby et le cyclisme, comme Sud radio, sa voisine.

Sur France Inter, on a donc longtemps pu entendre la voix aigrelette de Thierry Roland, entouré de Bernard Père ou d’Olivier Rey. C’est Jacques Vendroux, jusqu’alors spécialiste du tennis, qui va lui succéder. Avec sa voix de stentor, le neveu De Gaulle va devenir petit à petit l’autre voix de la France du football, avec souvent les mêmes travers et les mêmes défauts détectés chez son précurseur. Vendroux a toujours aimé intriguer dans les coulisses de la Fédération, usant de son influence pour faire et défaire les rois. C’est lui par exemple qui fut à l’origine de l’intronisation de Michel Platini à la tête de l’équipe de France, dans les années 1990, expérience de sinistre mémoire.

On se souvient des correspondants régionaux de France Inter, lors des Multiplex de Ligue 1 qui nous faisaient faire le tour de France en 90 minutes. Pierre Loctin, Max Provence, Thierry Gilardi, Jean Crinon, Marc Van Moer ou Alex Panzani (du Provençal). Toute une époque !

Vendroux, atteint par la limite d’âge, est parti sur Europe 1 revisité par Bolloré et la relève sur Inter n’est pas vraiment assurée, malgré la présence de journalistes comme Anthony Bellanger (du SNJ et de RSF) et l’arrivée de nombreuses femmes au service des sports (au grand dam-e de Balbir).

Et puis, le profil a changé. La Belgique avait ses chroniqueurs – supporters comme Arsène Vaillant ou Fred Debruyne, la France avait ses grandes gueules comme Thierry Roland ou Eugène Saccomano. On préfère maintenant des profils plus techniques, plus connaisseurs, plus policés, aussi. Faut-il s’en féliciter ? Pas si sûr, car le foot d’antan était une fête, pas une succession de statistiques, de performances, de chiffres et de rapports médicaux. Ouh la la… Tout à fait Didier !

7 juin 2022

Comments:

Quelle culture ! Quelle mémoire ! Impressionnant ! Et ça nous remet en tête plein de souvenirs un peu enfouis.
En revanche, j’ignorais qu’Anthony Bellanger était un spécialiste de la retransmission dé matches de foot-ball. Je ne l’ai jamais entendu que comme spécialiste de politique internationale. Un domaine dans lequel il excelle d’ailleurs.

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