LONDON DERBY (4)
Dernier volet de ce passage en revue des principaux clubs londoniens. On boucle avec un petit tour à l’ouest et trois clubs importants dans l’histoire du football anglais, même si en nette perte de vitesse dans la période. Watford, comme Queens Park Rangers et Brentford sont en effet pensionnaires de la deuxième division, y occupant les places d’honneur pour Brentford ou Watford, ou pas comme Queens Park, l’équipe phare des quartiers ouest.
On commence avec le Brentford F.C, club du sud-ouest londonien qui n’a jamais évolué en première ligue. Brentford est une ville de banlieue intégrée dans le grand Londres, sur la rivière Brent, d’où son nom. Les abeilles (the bees) du Brentford F.C ne jouent pas en jaune et noir, comme toute abeille (y compris qui aurait l’idée saugrenue de jouer au football) qui se respecte, mais en rouge et blanc rayés verticalement avec short noir. Le club a connu son heure de gloire dans les années 30 avant, après guerre, de faire l’ascenseur entre les 3° et 4° division anglaises. Rien de très glorieux, sauf cette remontée inespérée en deuxième division à l’issue de la saison 2013 – 2014, niveau où il se classe honorablement depuis lors. Les abeilles de Griffin Park ont aussi été trois fois finalistes de la Football League Trophy – dernière finale en 2011 – une coupe « consolante » engageant les équipes de troisième et quatrième division.
Julian Janvier, ancien défenseur central du Stade de Reims (passé aussi par le LOSC et le Red Star) a honoré les couleurs de Brendford mais on serait bien en peine de trouver dans l’historique des effectifs des joueurs un peu connus, à part Neal Maupay (ex Nice, Saint-Etienne et Brest), parti l’année dernière à Brighton. Pour cette saison, on trouve l’ex-amiénois Ghoddos, l’un des rares footballeurs iraniens évoluant en Europe et, prêté à West Ham, l’Algérien Benrahma. Mais ce qui caractérise le club, c’est la demi-douzaine de danois, souvent internationaux espoirs, composant un effectif où on trouve aussi un Suédois, un Finlandais et un Islandais. Bref, le grand nord pour ce club du sud-ouest qui, actuel deuxième du championnat de ligue 2 (derrière Norwich), pourrait bien faire ses débuts dans l’élite la saison prochaine. Les supporters des abeilles croisent les pattes.
Si Brentford a le vent en poupe, ce n’est pas le cas du Queens Park Rangers FC, le club du quartier cosmopolite de White City dans le West end qui, dès l’après-guerre, a accueilli toutes les minorités ethniques issues du Commonwealth. De White City (leur stade était le White City Stadium, maintenant Loftus Road), mais pas seulement, puisque tous les quartiers ouest de Londres (Shepherd Bush, Acton ou Ealing) sont derrière le club. À commencer par Roger Daltrey, chanteur des Who et supporter des rangers (ou des hoops, c’est selon) dans sa jeunesse avant de leur faire des infidélités pour Arsenal. D’ailleurs, tous les mods de l’ouest londonien étaient fans des QPR.
En maillot rayé horizontalement bleu et blanc, comme jadis le Racing Club de Paris, les Rangers se traînent à la 17° place de la deuxième division et risquent fort de descendre à l’étage inférieur, au grand dam de l’un de ses propriétaires, le magnat de l’acier Lakshmi Mittal.
Longtemps sociétaires de la première ligue, les Rangers n’affichent pourtant pas un palmarès impressionnant. Finaliste de la cup en 1982 (battus par Tottenham), une coupe de la ligue en 1967 et une deuxième place en championnat à l’issue de la saison 1975-1976 (derrière les Reds de la grande époque), ce qui leur vaudra une participation en coupe de l’UEFA l’année suivante où ils atteignent les quarts de finale. Mais c’est surtout les rivalités londoniennes qui motivent les joueurs, éternels rivaux de Brendford, de Fulham ou de Chelsea pour la suprématie des quartiers ouest. Challenge un peu dérisoire, mais les petites différences narcissiques sont plus importantes que les prestigieuses joutes nationales.
Plusieurs fois en faillite et racheté une première fois, en 2007, par l’ex directeur de Benetton Flavio Briatore associé au patron de la formule 1 Bernie Ecclestone, avant de l’être à nouveau en 2011 par Tony Fernandes, directeur d’Air Asia et Mittal. Du beau monde ! Après une dernière courte saison en première division en 2014-2015, le club végète à l’étage inférieur, sans beaucoup d’espoir de retour.
Des entraîneurs illustres se sont succédé aux chevets des Rangers dans la période moderne, de Terry Venables à Jimmy Hasselbaink en passant par Trevor Francis, Ray Wilkins, l’Italien fasciste (il faisait le salut hitlérien au public romain après ses buts) De Cano ou le Portugais Paulo Sousa, sans toujours réussir. Parmi les grands joueurs du passé, on peut citer Les et Rio Ferdinand, le déjà nommé Wilkins, Clive Allen, l’Argentin Oswaldo Ardilès ou le Français Djibrill Cissé (l’un des rares frenchies à avoir foulé la pelouse de Loftus Road).
L’effectif actuel est moins séduisant, et on serait bien en peine de détacher un nom parmi la trentaine de joueurs professionnels que compte le club. Un club qui renaîtra peut-être un jour de ses cendres, étant entendu que les grands clubs ne meurent jamais. La question est de savoir si QPR est vraiment un grand club.
Les guêpes après les abeilles. On connaît bien le Watford F.C par la pop star Elton John, qui en fut longtemps le propriétaire. Les Hornets (les frelons ou les guêpes) du nord-ouest londonien évoluent au Vicarage Road Stadium et revêtent d’affreux maillots jaunes et noirs. Logique, cette fois. Les Watford Rovers sont devenus le Watford FC et sir Elton en aura été le taulier pendant 25 années, considérées comme les meilleures du club.
Watford n ‘atteindra la deuxième division qu’en 1969 avant de disputer une finale de coupe, perdue contre Chelsea, l’année suivante. Après avoir éliminé Liverpool quand même. En plus d’en être le président « à vie », Elton John aura la main sur les Los Angeles Aztecs de George Best ou Johan Cruyff et il mettra suffisamment de livres au pot pour hisser la formation en première division, dans les années 80.
Après son règne, Watford connaîtra des hauts et des bas dans les divisions inférieures, avant de retrouver l’élite en 2014 puis de redescendre en 2019. Le club est dans le trio de tête de la deuxième division et entend bien retrouver sa place au sein de la première ligue.
Deux fois finaliste de la cup (1984 et 2019) et vice-champion en 1983, dauphins des Reds ; les années Elton auront permis à Watford de prendre la lumière. Des entraîneurs prestigieux se sont succédé comme les Italiens Vialli ou Zola ; les Serbes Jokanovic ou Ivic. Peu de joueurs connus en revanche, si ce n’est l’international écossais Neil Mc Bain ou le buteur anglo-jamaïcain Luther Blissett qui aura passé 20 ans au club pour un nombre incalculable de réalisations.
Dans l’effectif actuel, pas de quoi non plus s’affoler. L’inamovible gardien Ben Foster ou le Sénégalais ex rennais Ismaïla Sarr. C’est maigre, mais suffisant pour rêver de retrouver l’élite en fin de saison. Pas de français non plus à Watford. L’ouest londonien n’a jamais été accueillant pour les frenchies, mieux considérés à Arsenal ou à Chelsea. Après Elton John, Gino Pozzo, le fils du grand patron italien Giampaolo Pozzo, propriétaire de l’Udinese, a de quoi donner les moyens à Watford de remettre les crampons dans l’olympe du football anglais. Elton John, toujours supporter n°1, pourrait encore exulter et souffler ses chandelles dans le vent.
Londres – comme Liverpool, Manchester, Madrid, Barcelone, Milan, Turin, Rio de Janeiro, Sao Paulo ou Buenos-Aires – fait partie des grandes cités mondiales de football. Ce petit voyage nous aura permis de passer en revue douze clubs historiques, même si pas toujours les meilleurs, du football anglais. Le championnat national le plus prestigieux, avec celui d’Espagne, le plus observé par les commentateurs et le plus attirant pour les joueurs du monde entier. Rule, Britannia ! Over the world of foot.
On part à Buenos-Aires la fois prochaine.